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15 novembre 2022 2 15 /11 /novembre /2022 11:18

Lors de la conférence de presse donnée par le CNRS le 27 octobre 2022, Le climat éclairé par la science, Jérôme Chave, chercheur au sein de l'équipe CNRS qui pilote la station de recherche en écologie des Nouragues, a fait part des dernières publications (fin septembre 2022) du CNRS, qui viennent solder une enquête menée depuis 1986. Il s'agissait pour cette équipe d'étudier les réponses des forêts tropicales au changement climatique, ces forêts dites «matures», qui n'ont pas été gérées par l'Homme depuis au moins une centaine d'années. L'Amazonie donc pour une grande part, mais bien d'autres également, en Indonésie, en Afrique, etc.

Ces forêts, rappelait-il tout d'abord, sont essentielles pour nous, car elles sont de vrais puits de carbone qui nous aident naturellement à éliminer une partie du surplus de CO2 fabriqué par les hommes. Et a priori, on pourrait s'attendre à ce que l'augmentation de CO2 dans l'atmosphère leur soit favorable. Or il n'en est rien. Ce que leurs recherches montrent, c'est que ces puits décroissent. Non parce que la photosynthèse y serait devenue moins efficace, mais parce que les arbres meurent. Ce sont ces réponses des forêts tropicales aux changements climatiques qui inquiètent les chercheurs, qui étudient les raisons de cette surmortalité des arbres. Il y a certes de grandes disparités entre ces forêts, mais les courbes présentées de séries temporelles réalisées continent par continent révèlent une constante : celle d'un « Standing death » des arbres. En cause, les sécheresses successives et la décroissance continue depuis 1992 de l'humidité dans la canopée forestière, provoquant une perte importante et continue elle aussi de la biomasse. Ces écosystèmes pourtant fondamentaux pour la planète, et qui sont de véritables sentinelles du changement climatique, pourraient ainsi s'effondrer.

Il faut rendre grâce au CNRS de nous alerter si bien, si vite, si collectivement plutôt que de garder pour lui des résultats complexes, présentés ici avec une pédagogie sans faille. Pour ceux que cela intéresse, la conférence est en ligne et ne déroge à aucune déontologie, ne jouant ni de simplification, ni de catastrophisme : il faut à notre tour avoir le courage de voir la réalité en face.

 

Station scientifique des Nouragues - Laboratoire Ecologie, Evolution, Interactions des Systèmes amazoniens (cnrs.fr)

photo : Vue drone de Camp Pararé, station scientifique des Nouragues

 

vidéo présentant le centre, l'équipe et leurs travaux :

https://youtu.be/xWKiNgF4N0g

 

vidéo  : Le climat éclairé par la science | Conférence de presse - YouTube

 

#climate #climatecrisis #climateaction #cnrs #nouragues #amazonie #guyane #JoëlJégouzo @JegouzoJ 

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10 novembre 2022 4 10 /11 /novembre /2022 13:46

Il faut lire et relire ce philosophe allemand émigré aux Etas-Unis dans les années 1930, plus d'actualité que jamais, qui fit de l'obsolescence le paradigme de sa pensée, pour «que nous ne nous retrouvions pas à la fin dans un monde sans hommes»...

On le voit, rien n'est plus urgent en effet, à l'heure où les scientifiques du monde entier se rebellent et s'alarment de l'inaction criminelle des gouvernements face à la tragédie climatique qui arrive à grand pas.

Dans ce tome II de son œuvre philosophique, publié en 1980 soit 24 ans après la parution du Tome I, Günther Anders tente de cerner les responsabilités et les causes de l'effroi que nous avons fini par nous créer : la logique systémique du néo-libéralisme, qui est devenue le sujet du monde à la place de l'être humain.

Cette logique néolibérale, Günther Anders l'a analysée comme «le temps de la fin». Déjà, au sortir de la guerre de 39-45, il avait compris vers quoi tendait notre société : Donnez-nous aujourd'hui notre consommation quotidienne était devenu le nouveau credo d'un système qui ne peut survivre que par son absence de sobriété : la finalité de son monde est de fabriquer des produits, pas du Bien Commun, ni moins encore du bonheur. Des produits donc, Et si possible, à l'obsolescence programmée. «Le mécanisme de notre monde industriel consiste désormais à produire de l'obsolescence». Avec pour idéal manufacturier celui d'élaborer des produits réalisés par d'autres produits, les produits de consommation devant générer quelque chose en retour pour que la chaîne ne s'arrête jamais : de la frustration, des déchets, des cancers, etc. Ce quelque chose évidemment, apparaît aussi bien comme situation dans laquelle il devient nécessaire de produire de nouveaux objets de consommation courante : des médicaments par exemple pour soigner les cancers, de la médecine donc, ou du désir. Les consommateurs humains n'y importent qu'en tant que par leurs actes de consommation, ils veillent à la bonne marche de la machine de production. Et le meilleur des produits, bien sûr, et parce qu'il ne sert qu'une fois, c'est la balle des fusils...

A grande échelle, l'humanité s'est ainsi donnée les moyens de produire sa disparition. Par la bombe H aux yeux tout d'abord de Günther Anders, Hiroshima ayant constitué pour lui, avec Auschwitz, le dessillement majeur. Par le réchauffement climatique pour nous aujourd'hui.

«Nous travaillons chaque jour à la production de notre disparition», ajoute même Günther Anders : nous ne vivons plus une époque nouvelle, mais un délai conclut-il. Un délai, puisque l'homme s'est transformé en matière première périssable elle-même, elle-même obsolescente. Car tout doit devenir obsolescent dans le système capitaliste : les objets produits, les machines, les êtres humains, la liberté : l'être humain d'aujourd'hui est moins important que les objets dont il dépend. Nous avons ainsi déjà disparus en devenant non pas les bergers de l'être, mais ceux des dividendes.

 

Günther Anders, L'Obsolescence de l'Homme, T. II : Sur la destruction de la vie à l'époque de la troisième révolution industrielle, traduit de l'allemand par Christophe David, éditions Fario, 2022, 31 euros, ean : 9782953625820.

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23 septembre 2022 5 23 /09 /septembre /2022 13:54

Pierre Nora nous livre le second opus de son ego-histoire, celui des engagements intellectuels et éditoriaux. Un ouvrage essentiel, écrit dans la parfaite lucidité du poids qui aura été le sien, indispensable non seulement pour la compréhension des bouleversements de cette discipline dont, étonnamment, il n'était pas lui-même convaincu d'y être légitime, l'Histoire, mais qu'il porta pourtant de bout en bout sinon en anticipa les perspective, mais aussi pour l'appréhension de ces années 80 qui virent s'opérer un changement de paradigme non seulement dans le rapport des intellectuels à leur histoire, mais aussi et surtout, dans celle des français à la leur. L'opus, en définitive, se lit comme une contribution à une histoire intellectuelle du «présent», source incontournable pour la compréhension de l'histoire intellectuelle, sociale et culturelle de la France des sécessions : séparatisme des élites, désertion des oligarchies, reniement des médias, pronunciamiento des classes de pouvoir, sécession populaire, fracture sociale et désagrégation du vivre ensemble... Une histoire entièrement subsumée sous la montée en puissance des «sciences humaines» dans le champ éditorial et universitaire, symptôme de la mutation de la sensibilité intellectuelle et sociale de cette France du renoncement révolutionnaire autant que du recollement bataillonnaire : n'oubliez pas, il s'agissait alors de rompre avec le marxisme, rupture qui, dans le temps même où elle s'énonçait dans l'enthousiasme de la recognition savante, se claironnait dans l'euphorie des chargés de l'encensoir néo-libéral, qui ne se rendaient même pas compte qu'ils étaient les pires héritiers de ce qu'ils aimaient appeler «la pensée 68»...

C'est aussi toute la galerie des acteurs de ce «moment» dont Nora dresse le portrait, en même temps que l'analyse, fine, de ces «Trente Glorieuses de l'Histoire et des historiens», selon son expression, qui marquèrent la jubilation de vivre la fin de l'histoire «finie», à savoir, avant tout, l'échec de la conception marxiste de l'Histoire, et dont Faire de l'histoire aura été le manifeste.

Faut-il poursuivre ? Pierre Nora décrit parfaitement ce déplacement du centre de gravité de la discipline, accompagnant la montée en puissance du présent tout court dans nos vies, des vies de plus en plus soustraites au «collectif» pour le dire vite, jusqu'à poser désormais problème quant à la possibilité d'y faire société. Et peut-être est-ce là qu'il faut reprendre, là précisément où Pierre Nora met un terme à sa biographie «savante» (le dernier volume sera consacré à l'amitié, l'amour), en même temps qu'il vient de mettre un terme à la revue Le Débat, qui aura cornaqué toute cette période de réévaluation.

Le débat est donc clos, oserions-nous : même s'il nous laisse en plan au moment le plus crucial de l'histoire de nos sociétés, qui ont en charge et le dépassement de l'impasse néo-libérale et le devoir non plus d'inventaire, mais de prendre à bras le corps la possibilité d'une fin nouvelle, la nôtre, sous couvert de changement climatique.

Le débat est clos, il faut agir. L'histoire qu'évoque Pierre Nora «nous» a balayés, mais pas éliminés, pour reprendre la formule de Marcel Gauchet. Il faut à présent en changer le mot d'ordre, passer du «Penser le monde plutôt que le transformer» cher à Pierre Nora, à la nécessité de sortir de l'impasse dans laquelle Macron nous a enfermés. Il faut transformer le monde, changer de modèle de société. Il faut dynamiter les cadres de nos imaginaires politiques, une fois réalisé que l'implosion du système politique français n'était autre que le reflet de l'implosion du vivre ensemble français, sans cesse encouragée par le pouvoir discrétionnaire de Macron.

Partir de ce legs donc. Un vrai commencement, mais en partir.

Prenons par exemple la réflexion historiographique de Pierre Nora : l'Histoire changeait de route, écrit-il. Elle passait ailleurs, «moins par les actes que par les symboles», pour devenir une histoire qui n'était plus le récit de ce qui s'était passé, mais celle de la fabrique de l'événement, sinon de la vérité, tels que les médias et le pouvoir politique allaient en décider. Il y a là de quoi donner du grain à moudre, même si, dans sa réflexion, Pierre Nora ne va jamais jusqu'à dénoncer les lieux institutionnels de cette «fabrique» : la période qu'il décrit est celle de la montée en puissance des médias comme fondement du pouvoir politique et leur extinction en tant que contre-pouvoir. Les médias comme résidentiel de cette fameuse post-vérité dont les institutions ont hypocritement fait leur cheval de bataille, destiné à combattre un faux ennemi sur le seul terrain des réseaux sociaux alors que c'est en leur sein qu'il parade avec le plus d'outrecuidance.

Mais dans l'ordre qu'affirme ce pouvoir, le changement ne sera pas que sémantique ou sémiotique : la répression policière en marche partout dans le monde l'illustre bien : quoi qu'en dise Pierre Nora, ça saignera encore, ça saignera beaucoup.

Là est notre combat, bien que le champ parcouru par la promotion du retour du sujet ait mis à mal notre capacité à transformer la société, dont on sait pourtant aujourd'hui qu'il y a urgence à le faire.

Le Débat est clos : il faut penser la transformation de ce monde, plus que jamais !

 

 

Pierre Nora, Une étrange obstination, NRF Gallimard, août 2022, 342 pages, 21 euros, ean : 9782072995415.

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14 septembre 2022 3 14 /09 /septembre /2022 10:47

Ayons le courage d'avoir peur, car «C'est en tant que morts en sursis que nous existons désormais», ainsi que l'affirmait le philosophe allemand G. Anders après Hiroshima et face, déjà, à l'imminence des catastrophes écologiques qu'il pressentait.

«Semeur de panique», ainsi que le nomme très justement Florent Bussy, Anders avait fait de l'obsolescence le concept fondamental de son œuvre. Cette obsolescence constitutive de notre modèle économique, et dont il avait compris qu'elle s'étendrait à tous les domaines de la vie, au point de rendre un jour l'humain lui-même obsolescent.

Ancien élève de Husserl, de Heidegger, premier époux de Hannah Arendt, ami de Hans Jonas, Anders avait fui l'Allemagne nazie avec Hannah dès 1933, lucide quant à ce qui arrivait. Très tôt, il avait fait des camps de concentration (Dachau fut ouvert dès 1933 sans que le monde y voit à redire), de la technique, des nouvelles technologies puis de la bombe atomique ses objets d'étude philosophique, avant de fuir l'université, à ses yeux incapable de nous aider à y voir clair. C'est là du reste que pour lui, se manifestait avec le plus d'acuité le décalage prométhéen qui a saisi l'humanité, dans cette séparation entre le penser et l'agir qui nous livre à la catastrophe et nous rend même incapables de penser ces catastrophes.

Reprenons. Pour Anders, «l'apocalypse» a déjà eu lieu : Auschwitz, Hiroshima. Nous croyons lui avoir survécu, mais elle n'a ouvert aucune issue et s'avance vers son achèvement : l'effondrement écologique. Pourtant, chacun a été mis en demeure de se prononcer, en demeure de prendre ce danger au sérieux. Son injonction à la peur vaut la peine d'être entendue face à la violence inouïe de notre monde et à la surdité fantastique du personnel politique face à l'imminence de la catastrophe écologique. Il est frappant au demeurant d'entendre l'ancien président du GIEC, Jean Jouzel, déclarer aujourd'hui que l'une des grandes erreurs du GIEC aura été de ne pas communiquer sur les catastrophes climatiques qui ne vont cesser de se multiplier, comme si résister à la panique légitime face à ce qui nous attend, avait permis de l'éviter...

Il aurait donc fallu déjà que notre sens de l'existence soit ébranlé avec Auschwitz et Hiroshima. Mais il ne l'a pas été. Le pire, c'est que le monstrueux d'Auschwitz par exemple, on ne l'a pas vu : que des millions d'êtres humains, ingénieurs, chauffeurs, fonctionnaires, aient participé à la mise en œuvre de la solution finale sans broncher. Que des millions d'êtres humains aient pu réduire les enfants à des «produits» soumis à un processus industriel d'abattage, sans méchanceté aucune. Or tout cela a été rendu possible parce que nul ne voyait le rapport de soi à soi-même. Et c'est bien ce décalage qui nous conduira de nouveau à la répétition de l'horreur, dont la possibilité est inscrite au cœur même de notre modernité économique : le système néo-libéral est devenu notre destin à tous, avec son organisation du travail qui dilue les responsabilités, son organisation des responsabilités qui interdit d'avoir une vision globale de ce à quoi une tâche contribue : «nous ne restons concentrés que sur d'infimes segments des processus d'ensemble». Pour Anders, cette logique a pour conséquence que les êtres humains ne sont plus capables de penser ce qu'ils font et leur savoir est ainsi plus proche de l'ignorance que de la compréhension : nous savons que nous allons droit dans le mur, mais nous ne le comprenons pas. L'effacement des responsabilités est tel, que nous pensons en dehors de toute implication de ce que nous faisons, sur la nature par exemple. «Délivrés» de la liberté de conscience, nous agissons sans penser et pensons sans agir...

Anders a interrogé le pilote de l'avion de reconnaissance chargé d'assister le largage de la bombe A sur Hiroshima. Au cours de leur entretien, ce pilote a fini par avouer que tout en donnant les indications techniques qui permettaient un largage sans défaut, il songeait à ses propres problèmes domestiques... La vidange de la voiture, changer le réfrigérateur... Nous sommes ce pilote incapable d'avoir une vision des conséquences de sa tâche.

Le néo-libéralisme ne survit que grâce à l'obsolescence des objets qu'il produit, avec force destruction des ressources naturelles. Des objets sans valeur et la plupart du temps inutile. Si bien que dans cette logique, l'humanité est elle-même devenue inutile...

 

 

Florent Bussy, Günther Anders : nos catastrophes, éd. Le Passager clandestin, 3ème trimestre 2020, 124 pages, 10 euros, ean : 9782369352440.

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8 septembre 2022 4 08 /09 /septembre /2022 12:59

Jean Jouzel, paléoclimatologue, qui fut le président du GIEC de 2002 à 2015, Hervé Le Treut, climatologue, spécialiste de la simulation numérique au GIEC et le philosophe Dominique Bourg, dressent le bilan de soixante années d'études internationales consacrées au climat, en s'attachant beaucoup à retracer l'histoire du GIEC depuis sa création, en 1988.

Un document essentiel pour quiconque veut comprendre le vif des débats autour du réchauffement climatique, et n'entend pas s'enfermer dans le seul périmètre des questions de températures...

Or, à tout le moins, la déception dont ils témoignent quant aux décisions qui auraient dû être prises, est tristement révélatrice : nous irons droit dans le mur. Non pas «nous allons», mais nous irons, comme animés par la volonté farouche d'en finir avec nous-mêmes... Nous y sommes du reste déjà, tant, surtout, la classe politique se refuse à agir pour nous éviter le pire.

Certes, l'été 2022 aura marqué un tournant. Tout le monde y sera allé de son bon mot. Et c'est à peu près tout. Les faits sont à présents non seulement bien documentés, mais éprouvés dans la chair de milliards d'humains. Inutile d'en dresser la liste : le changement climatique est désormais une réalité sensible que tout le monde perçoit.

 

Le plus percutant de leur intervention est ailleurs, même si l'histoire qu'il déroule est édifiante et fort instructive. Le plus percutant, c'est tout d'abord la nécessité d'intégrer tout le vivant dans nos modèles pour comprendre les effets du changement climatique et non nous contenter d'enregistrer les records de chaleur battus ici et là. Il faut désormais penser ce changement comme celui d'un tout : le système terre. De la disparition des espèces à leurs migrations, végétales, animales, humaine, jusqu'à l'étude des conséquences du réchauffement des océans dont nous ne savons rien encore, il faut absolument étudier ce changement comme affectant la totalité de la vie planétaire pour tenter d'en appréhender le caractère cumulatif. Or, affirment-ils, quand on saisit ce qui arrive en terme de complexité, ce que l'on observe, c'est la mise en place d'un nouvel état du système terre, qu'il nous faudra assumer pendant des centaines d'années : le point de non-retour est atteint.

Le plus hallucinant dans leurs interventions est ainsi cette révélation du caractère irréversible de ce que nous avons provoqué. C'est-à-dire que même si, aujourd'hui, on était à zéro émission de gaz à effet de serre, les centaines d'années à venir resteraient hypothéquées par un système extrêmement dangereux pour l'habitabilité de la terre : le réchauffement se poursuivrait sur des dizaines d'années...

Le plus effrayant c'est encore de réaliser que les événements extrêmes, ouragans, méga-incendies, inondations dantesques, minimisés aujourd'hui comme « exceptionnels », sont désormais la norme.

Le plus effarant, c'est alors de comprendre que le climat est devenu un phénomène de bascule du système terre : on ne vit pas une « crise » climatique, mais la bascule d'un état de la terre à un autre. Impossible à stopper. Ce qui nous attend ? Les événements extrêmes, inondations, incendies, sécheresses, cyclones vont acquérir à partir d'aujourd'hui un potentiel destructeur inouï. Nous sommes entrés dans un système qui va devenir à très très brève échéance hors de contrôle.

Et la caste politique ne fait rien. Du vent. Jean Jouzel, Hervé Le Treut, ne passent pas pour autant sur leur propre responsabilité en tant que scientifiques : dans les années 90, les rapports demeuraient très, trop prudents. L'éthique prudentielle des scientifiques doit désormais être combattue : il faut communiquer sur ces événements extrêmes qui frappent l'opinion et qui, seuls, parce qu'ils vont se démultiplier, permettront peut-être d'aller au-delà de la simple prise de conscience et d'agir.

Agir... On ne peut qu'être troublé en dernier lieu par le constat qu'ils font, eux qui ont rencontré tous les décisionnaires du monde politique : impossible d'obtenir du niveau international, comme du niveau national, le moindre pas en avant. C'est au niveau local que les choses commenceront à bouger pensent-ils. De quoi désespérer, non ?

 

Le devenir du climat, Dominique Bourg, Jean Jouzel, Hervé Le Treut, éditions Frémeaux & Associés, 04/03/2022, 3 CD, ean : 3561302582023.

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8 avril 2022 5 08 /04 /avril /2022 14:21

Auteurs, éditeurs, libraires, médias... Ne manque qu'une analyse du segment diffusion/distribution pour que cette chaîne du livre soit complète. J'y reviendrai. Julien Lefort-Favreau a tenté dans cet essai de comprendre les vertus et les impasses du monde du livre. Un travail essentiellement centré sur les acteurs « indépendants » ou déclarés tels de cette chaîne, prenant pour modèles certains d'entre eux, emblématiques de la « résistance » du secteur aux dérives du marketing culturel, qui ne voit dans l'objet livre que sa valeur marchande et font litière de ses dimensions culturelles. Une réflexion documentée, argumentée, mais datée, j'y reviendrai là encore, qui d'emblée s'affronte à un problème de définition : qu'est-ce qu'un éditeur indépendant, quand de grosses structures comme Actes Sud, qui dégagent des millions de bénéfice réinvestis en spéculations immobilières, dixit Julien Lefort-Favreau, s'en revendiquent ? D'autant que Julien Lefort-Favreau a écarté de son panel les micro structures éditoriales qui ne cessent de fleurir en France, à croire que l'on est revenu à l'ère du samizdat... Micro structures indépendantes par la force des choses, écartées ici pour des raisons d'efficacité politique disons : Julien Lefort-Favreau a choisi de ne s'intéresser qu'aux structures qui ont acquis de la visibilité, considérant qu'au fond, c'est de l'intérieur même du marché du livre qu'il faut en combattre les dérives. Il n'a pas tort. Mais peut-être faudrait-il reprendre à nouveaux frais cette réflexion, pour comprendre et la situation de l'édition et celles des auteurs, et dans une large mesure, celle aussi des petites librairies indépendantes, dans un marché qui s'est concentré si vite que l'étude de Julien Lefort-Favreau en paraît déjà dépassée !

Boloré s'est en effet implanté dans ce marché, pour y devenir « le Monsanto de l'édition », selon l'expression d'un journaliste d'ActuaLitté, et sa présence massive conjuguée aux dernières concentrations dans le secteur de la diffusion/distribution, d'Hachette/Editis à Sodis/Flammarion, concentrations qui ont largement dépassé le cadre de la distribution pour envahir le champ éditorial et imposer en aval des conditions de vente exorbitantes aux librairies indépendantes, font que l'indépendance est devenue héroïque, sinon suicidaire : nous assistons peut-être en direct à l'effondrement de notre culture...

Inutile de préciser ici les conséquences de ces concentrations sur la création littéraire, en amont comme en aval, car soumis à l'oppression financière des grands groupes capitalistes, ce que signe le groupe Boloré n'est rien moins que la généralisation de l'imposture sociétale et l'achèvement de notre décomposition morale...

La disparition de la petite librairie indépendante en est le symptôme au demeurant, celui du vide sidéral qui jalonne l'hygiénisation forcenée de nos centres urbains, où tout est petit à petit vidé de toute aspérité culturelle, où la neutralisation de l'espace politique doit devenir la règle. La globalisation des industries « culturelles » engendre au fond la disparition de la culture, à l'image des espèces animales en voie d'extinction... Fort heureusement, comme le signale Julien Lefort-Favreau, des résistances s'organisent : celle d'Eric Hazan et de sa maison d'édition La Fabrique en est la vivante preuve.

 

Julien Lefort-Favreau, Le luxe de l'indépendance, réflexions sur le monde du livre, Lux éditeur, coll. Futur proche, 1er trimestre 2021, 160 pages, 14 euros, ean : 9782895963554.

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4 avril 2022 1 04 /04 /avril /2022 07:54

Poète, écrivain, chercheur, fondateur du département français de l'université de Gaza, Ziad Medoukh raconte, en français et au jour le jour, l'horreur de ces onze journées de terreur orchestrées par l'armée israélienne en mai 2021. La Palestine vit alors, comme nous, la crise sanitaire. Gaza n'y échappe pas. Immense prison à ciel ouvert, les palestiniens dont on rappellera qu'ils n'ont pas le droit de se défendre, vont alors subir une double peine : celle de la crise sanitaire et cette terreur imposée par l'état d'Israël. 1800 raids au total contre les populations civiles. Du ciel, les avions larguent leurs bombes, anéantissant des quartiers entiers. 280 palestiniens périront, assassinés, dont 69 enfants, dans le silence absolu du monde dit libre... 45 000 palestiniens devront chercher des refuges précaires, tant sont importantes les destructions. La liste en est longue du reste, dont Ziad Medoukh a tenu le compte. Parmi ces destructions, celle de la librairie Mansour, librairie historique et principale ressource culturelle des gazaouis. Une cible militaire ? A qui le fera croire l'état hébreu ? Tout comme les enfants de Gaza, qui ont payé un très lourd tribu au cours de ces onze jours. Effarants, insupportables. Un massacre. Délibéré : les cliniques, les hôpitaux, systématiquement visés, détruits. Les cimetières aussi, pour marquer sans doute les esprits... L'orphelinat de Gaza... Des milliers de blessés, les infrastructures détruites, les nappes d'eau souterraines détruites, l'espace de pêche fermé, les jardins d'enfants bombardés, les stations de traitement des déchets anéanties, il faut lire cette longue énumération hallucinante pour réaliser la barbarie de cette attaque, et la catastrophe vécue par les palestiniens. Pour réaliser ce que leur vie peut être désormais. Les pharmacies, les routes, les rues, les voies, les citernes d'eau potable : le saccage de Gaza en pleine pandémie de covid ! Comment le monde libre a-t-il pu fermer pareillement les yeux ?

Comment ne pas comprendre qu'il s'agissait de terroriser les gazaouis ? Car il n'est pas possible de parler de guerre, tant la violence est disproportionnée. Parlons de terreur. Entendons Ziad Medoukh, quand il affirme qu'au fond, l'une des visées de cette action était aussi d'empêcher la construction d'une société palestinienne. Et rappelons la condamnation vaine de l'ONU, rappelons les mots de Human Rights Watch parlant de «crime d'apartheid et de persécution», rappelons même les mots de Dominique de Villepin, en 2014, affirmant que par ses actes, l'état hébreu se condamnait «à devenir un état ségrégationniste» (Figaro du 6 juillet 2014).

 

Ziad Medoukh, Chronique sous les bombes à Gaza -récit de la 4ème offensive israélienne (10-21 mai 2021), édition Culture et Paix, juillet 2021, 84 pages, 10 euros, ean : 9782956997818.

Pour vous procurer l'ouvrage : Association Culture et Paix, 20 rue Cadet 75009 Paris.

baudoin-laurent@wanadoo.fr

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4 février 2022 5 04 /02 /février /2022 09:47

Publiés tout d'abord en Italie en 1997, ces entretiens, destinés au public italien et offerts comme une introduction à la pensée de Derrida, ont été édités pour la première fois en France en 2018 dans la présente édition, chez Hermann. Ils sont en fait la restitution dactylographiée fidèle aux archives de l'IMEC. A remarquer : l'original, déposé à l'IMEC est annoté de la main de Derrida : il y avait des « restes » sur lesquels Derrida voulait revenir encore, ne parvenant pas à clore sa pensée, toujours en mouvement, toujours en suspens d'une suite à venir dont sa mort nous a privée.

C'est quoi faire l'expérience de la pensée ? Voilà en gros autour de quoi gravitent ces entretiens. C'est la suivre jusqu'au bout, dès lors qu'elle est levée. On se rappelle l'injonction des Lumières. Kant. L'un des philosophes majeurs de Derrida, de son aveu dans ces entretiens, avec Platon bien sûr, Hegel et Husserl.

La suivre donc jusqu'au bout, dès lors qu'elle est levée. Encore faut-il qu'elle lève, ou « se » lève... Se lève ? Et donc entendre quelque chose comme son appel ? Voilà qui rappelle Levinas, pour qui le plus important était la question de la réponse faite à cet appel. Derrida raconte l'irruption de cet appel de la philosophie dans sa vie. Répondre, oui mais comment ? Par l'insistance ajoute-t-il. On se rappellera ici les lectures insistantes du philologue Jean Bollack : insister, non totaliser. Car la philosophie, bien que construite au moins jusqu'au moment Nietzsche comme système, ne peut à vrai dire se satisfaire d'une totalisation systémique. Les dernières en date, celle des théories systémiques, ont montré leurs faiblesses et avoué leurs horizons : un monde débarrassé de l'humain. La philosophie ne peut s'embarrasser d'un système clos sur lui-même, affirme Derrida, aussi brillant, aussi fascinant soit-il (on songe ici à Hegel). Elle ne peut pour autant s'apparenter à l'assemblage de propositions ontologiques. C'était un peu cela, la Déconstruction, attaquée aujourd'hui de toute part : la tentative d'affirmer tout système impossible, tout en gardant le souci de la cohérence intellectuelle et celui de la responsabilité philosophique d'une pensée qui reste toujours, avant tout, expérience. Derrida revient dans ces entretiens sur ces grands philosophes qui l'ont marqué. Platon, Kant, etc. Pour expliquer que très tôt il s'est intéressé à leurs notes de bas de page. Là où ça tiraillait, là où leur pensée se retrouvait finalement confrontée à ses restes, ou ses excédents. Là où, aussi, l'imagination semblait prendre le pas, dans une liberté que le corps du texte n'autorisait pas. Un lieu troublant dans l'élaboration de la clarté intellectuelle, que ces notes de bas de page, largement envahies par quelque chose qui relève au fond de la « fiction » dirions-nous, là où la tentative, comme la tentation de faire système, ne parvient jamais à ses fins ni le système à se clore.

 

Jacques Derrida, Le goût du secret, entretiens (1993-1995) avec Maurizio Ferraris et Gianni Vattimo , éditions Hermann, 14 février 2018, 134 pages, 16 euros, ean : 9782705694814.

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3 février 2022 4 03 /02 /février /2022 11:57

L'un des trois essais les plus marquants de l'année 2021 et qui reprend à nouveaux frais autant la question de la forme, que celle du visible, en renouvelant les études anthropologiques. Questionnement essentiel que celui de la figuration, car de quoi témoignent ces formes du visible, sinon de notre condition humaine même ? La réflexion est donc magistrale -il le fallait pour dépoussiérer nos habitudes de pensée.

Que voit-on du monde ? Pas grand chose : on le savait depuis que la physique était venue à la rescousse de l'étude des conditions du voir, dénouant le lacis des schèmes cognitifs et visuels qui le saturent. Mais ce n'était pas aller encore assez loin. Philippe Descola s'est interrogé, lui, sur les catégories descriptives que nous avons forgées pour appréhender ces formes, pour réaliser qu'elles ne parvenaient jamais à rendre compte de leur diversité. On cherche, en fait, dans les formes auxquelles nous pouvons être exposés, celles qui ressemblent aux formes déjà répertoriées. On cherche, d'abord, quelque chose qui ressemble à nos savoirs acquis de longue lutte, au sein d'un périmètre toujours trop étroit. Les outils intellectuels des sciences sociales reconduisent finalement des types de configurations épistémologiques engendrées par la philosophie des Lumières, principalement articulées par l'idée d'une culture universelle. Auscultant la frontière humain / non humain, Philippe Descola nous montre qu'il n'existe pas un seul monde et que nos savoirs ne sont au fond que des filtres ontologiques destinés à tamiser ces mondes qui nous entourent, qui s'entrecroisent pourtant, se chevauchent. Le monde des chats n'est pas celui des chênes, ni le nôtre, bien que ça et là, nous en partagions des aspects. Intellectuellement, nous vivons repliés derrière des dispositifs de cadrage qui nous font reconnaître ce que nous savons déjà, et ignorer ce que nous ne savons pas : ce qui va sans dire... Des jugements d'identité en somme, qui opèrent à la hâte leur saisie du monde, pour structurer nos comportements.

Poussant plus loin ses recherches, Philippe Descola propose quatre modes d'identification autour desquels l'humanité s'est organisée. Le totémisme, l'animisme, l'analogisme, le naturalisme. Prenons le dernier mode, le naturalisme, à vrai dire largement le nôtre à nous, « occidentaux », différenciant l'être humain par son esprit plutôt que son corps : comment, dans cette ontologie, comprendre les autres ontologies ? Certes, toujours selon Philippe Descola, désormais, ces systèmes se chevauchent au sein parfois d'un même individu. Il n'empêche. En outre, ce sont précisément ces chevauchements qui l'intéressent et qu'il traque dans son essai, les mettant à jour en particulier dans les représentations du visibles que se sont forgées les diverses sociétés humaines. Un travail extraordinairement efficace que celui de débusquer les schèmes ontologiques qui trament les images que nous animons et qui sont de grands agents de notre vie sociale. De même examine-t-il avec brio comment une même image fonctionne dans plusieurs ontologies. Des images que nous peinons in fine toujours à insérer dans un discours analytique, rappelant d'une certaine manière les conclusions de W. J.-T. Mitchell dans son magistral essai : « What do pictures really want ? ».

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17 novembre 2021 3 17 /11 /novembre /2021 10:47

Qu'est-ce qui fait Moyen Âge dans l'histoire du monde latin ? Florian Mazel est parti de là, reprenant à nouveaux frais les récits qui ont bâti notre vision de cette période historique, celles de Duby et de Le Goff tout particulièrement. Il en est revenu avec cette somme, qui ne s'est pas contentée de dépoussiérer les études médiévales, mais de les réarticuler entièrement autour d'une nouvelle périodisation. Là où Duby situait le point de bascule autour de l'an mille, du fait de son parti pris de n'envisager son approche qu'à travers le prisme socio-économique, découpant cette histoire en trois périodes distinctes : le Haut, le Central et le Bas Moyen Âge, les contributeurs de l'ouvrage se sont mis d'accord pour établir plutôt ce point de bascule vers la fin du XIème siècle, conduisant à une nouvelle périodisation ne comprenant que deux âges : le Premier Moyen Âge qui est celui de la sortie du monde antique, du Vème siècle jusqu'au milieu du XIème, et un second Moyen Âge qui court jusqu'au XVème siècle cette fois, excluant la tentation de le prolonger au-delà comme l'essayaient nombre de médiévistes, et qui consacre l'avènement d'un nouveau monde. Le point de bascule, cette fois, c'est le moment grégorien, conçu comme moment épistémologique, celui à partir duquel l'institution ecclésiale prend conscience d'elle-même et de son rôle, social, économique, culturel, politique, idéologique, etc., dans la formation du monde latin. Ce moment où elle s'autonomise du pouvoir laïc pour déployer son emprise sur toute la société et dans tous ses aspects. Le moment grégorien vient ainsi clairement déposer l'horizon idéologique du premier Moyen Âge, héritier de l'empire romain chrétien, pour adosser à l'institution ecclésiale la question de l'état et de la société : c'est moins l'église comme religion donc qui se trouve au centre des recherches, que l'institution ecclésiale, dans ses fonctions territoriales et administratives. On le voit, le Droit et la Sociologie sont ici devenues les sciences auxiliaires déterminantes du médiéviste. Avec l'Archéologie, car cette rupture a pour beaucoup pu être mise à jour sous la poussée des nouveaux territoires conquis par la discipline, dont l'archéoscience centrée sur l'étude de l'impact de l'environnement, ou l'archéogéographie centrée sur l'impact de l'homme sur les paysages.

Bien évidemment, ces recherches ont aussi suscité en amont comme en aval de la période étudiée de nouvelles interrogations, qui ont conduit en particulier en amont à ouvrir tout un champ de recherche pour l'établissement d'une nouvelle période historique qui serait celle de l'Antiquité tardive, autour des interrogations d'un Augustin par exemple, s'efforçant de penser le monde d'après Rome. Il y a là beaucoup à défricher de nouveau...

Outre cet intérêt majeur, cette nouvelle histoire a le mérite de mieux cadrer le concept de Moyen Âge, une catégorie purement européenne de l'Histoire -malgré les tentatives de transposition à l'histoire du Japon. En somme, une périodisation propre à une région du monde qui a du mal, aujourd'hui encore, à se projeter dans ce monde... Une scansion, écrit Mazel, forgée par et pour l'Europe et qui ne garde sens qu'à l'échelle européenne. L'enjeu de cette nouvelle histoire, qui ne renonce pas à la catégorie de Moyen Âge, était donc aussi d'ouvrir cette histoire à la compréhension des mondes qui l'entouraient, de Byzance à l'Extrême Orient, en passant par l'Islam ou l'Asie Centrale. Une manière d'en finir avec la crispation identitaire qui se rejoue aujourd'hui autour de l'instrumentalisation du Moyen Âge européen. Est battue en brèche, par exemple, la thèse de la fracture du monde méditerranéen par l'intrusion de l'Islam. D'une manière générale, tous les paradigmes qui ont nourri notre vision du Moyen Âge sont ici réévalués et souvent dissous.

Séduit enfin, ou rassure, le rappel des exigences formulées par Marc Bloch en 1928 : « cessons de causer éternellement d'histoire nationale à histoire nationale », explorons une histoire nouvelles aux échelles variées.

 

Nouvelle Histoire du Moyen Âge, sous la direction de Florian Mazel, éditions du Seuil, octobre 2021, 1044 pages, 39 euros, ean : 9782021460353.

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